Transition énergétique : le thorium face aux limites de l’hydroélectricité au Québec

Découvrez comment les avancées chinoises sur les réacteurs au thorium pourraient transformer la transition énergétique du Québec au-delà de l’hydroélectricité.


La Chine vient de franchir un cap historique dans l'univers de l'énergie nucléaire : en avril 2025, elle a réussi le premier rechargement en ligne d'un réacteur au thorium à sels fondus, une prouesse technique qui ouvre des perspectives inédites pour la production d'électricité propre [1]. Cette avancée survient à un moment critique où les grands projets hydroélectriques accumulent les difficultés. Plusieurs analyses de grands projets hydroélectriques évoquent des dépassements fréquents de délais et de coûts : en moyenne, leurs coûts réels dépassent de 96 % les prévisions initiales, et les délais augmentent de 42 %. Près de huit projets sur dix connaissent ainsi un dépassement de budget ou de calendrier, selon une étude de référence menée pour la Commission d’enquête sur le projet Muskrat Falls [4]. Dans ce contexte, le thorium pourrait-il offrir une alternative crédible pour la transition énergétique au Québec 

Les percées chinoises qui changent la donne

Le géant asiatique ne fait pas que parler d'innovation énergétique : il la concrétise. Le prototype TMSR-LF1 de 2 mégawatts, opérationnel depuis 2023, vient de franchir une étape décisive avec son premier rechargement en ligne réussi [1]. Cette technologie révolutionnaire permet d'alimenter le réacteur en combustible sans l'arrêter, contrairement aux réacteurs à uranium conventionnels qui nécessitent des arrêts prolongés pour le changement de combustible.

L'ampleur du projet chinois est impressionnante. L'objectif fixé est ambitieux mais réaliste : déployer une centrale de démonstration de 10 mégawatts électriques d'ici 2030. Cette progression méthodique s'appuie sur un atout géologique considérable : les réserves chinoises de thorium sont suffisantes pour alimenter le pays pendant plus de 20 000 ans [2]. Une sécurité énergétique qui fait rêver bien des nations.

Mais pourquoi cette course au thorium ? La réponse réside dans ses propriétés exceptionnelles. Contrairement à l'uranium-235 utilisé dans les centrales actuelles, le thorium-232 est trois fois plus abondant sur Terre et peut être entièrement consommé dans le processus de fission. Cette efficacité remarquable, combinée à l'impossibilité physique d'emballement nucléaire, positionne le thorium comme une solution d'avenir pour une énergie nucléaire intrinsèquement plus sûre.

Pour Squatex, cette révolution technologique illustre parfaitement l'importance d'explorer les énergies propres alternatives. Alors que l'entreprise québécoise se positionne comme un leader de la transition énergétique, ces avancées chinoises démontrent que l'innovation peut transformer radicalement notre approche de la production électrique.


Thorium vs barrages - Avantages temporels et environnementaux

La comparaison entre le thorium et l'hydroélectricité révèle des écarts saisissants qui remettent en question nos stratégies énergétiques. Les projets de barrages hydroélectriques souffrent chroniquement de dérapages : près de 80 % subissent des retards, et plus de 75 % dépassent leur budget initial, avec en moyenne 42 % de retard et 96 % de surcoût [4]. Ces chiffres ne sont pas anecdotiques quand on sait qu'une construction hydroélectrique nécessite en moyenne plus de 10 années, sans compter les études préliminaires et les évaluations environnementales.

Le thorium propose un paradigme différent. Les réacteurs modulaires à sels fondus peuvent être préfabriqués en usine puis assemblés sur site, réduisant considérablement les délais de construction. Cette approche industrielle contraste avec les chantiers pharaoniques des grands barrages, souvent confrontés à des défis géotechniques imprévus et des oppositions locales.

L'avantage environnemental du thorium est tout aussi remarquable. En phase opérationnelle, ces réacteurs produisent très peu d’émissions de gaz à effet de serre. Selon une analyse du cycle de vie réalisée à l’Université de Cambridge, le bilan carbone total d’un réacteur au thorium se situe entre 6,6 et 13,2 g CO₂ éq./kWh, un niveau comparable à celui de l’éolien offshore et nettement inférieur à la plupart des autres sources d’énergie [3]. Cette performance rivalise avec l'hydroélectricité tout en évitant les impacts écologiques massifs des grands barrages : modification des écosystèmes aquatiques, déplacement de populations, et émissions de méthane par décomposition de la végétation submergée.

La flexibilité d'implantation constitue un autre avantage décisif. Alors que l'hydroélectricité dépend entièrement de la topographie et de l'hydrologie, les centrales au thorium peuvent s'implanter près des centres de consommation, réduisant les pertes en ligne et les coûts de transport électrique.


Cette polyvalence s'aligne parfaitement avec la mission de Squatex d'explorer des énergies propres alternatives. L'entreprise, qui se positionne comme pionnière en solutions énergétiques durables, pourrait voir dans le thorium une opportunité de diversification stratégique, complémentaire à ses activités d'exploration d'hydrogène naturel et de métaux critiques.

Émissions moyennes de CO₂ par kWh selon la source d’énergie (cycle de vie complet)

Perspectives pour le Québec - Une alternative aux nouveaux barrages

Le Québec se trouve à un tournant énergétique crucial qui pourrait voir le thorium jouer un rôle déterminant. La demande électrique québécoise devrait atteindre 60 térawattheures d'ici 2035, puis exploser vers 150 à 200 térawattheures d'ici 2050, portée notamment par l'électrification des transports et l'expansion industrielle [5]. Cette croissance exponentielle dépasse largement la capacité de développement hydroélectrique traditionnelle de la province.

Le gouvernement québécois reconnaît déjà que le nucléaire pourrait devenir "essentiel" pour répondre à cette demande croissante. L’exemple de Churchill Falls illustre bien la transformation économique de l’hydroélectricité au Québec. Le contrat de 1969, qui fixait le prix à 0,2 ¢/kWh, offrait au Québec un approvisionnement quasi symbolique. Or, la nouvelle entente de 2024, prévoyant un tarif d’environ 4 ¢/kWh, marque une normalisation vers des valeurs de marché. Cette multiplication par vingt du prix d’achat met en perspective les défis de coût et de renouvellement des infrastructures hydroélectriques [6].

Le thorium pourrait s'intégrer parfaitement dans ce nouveau paysage énergétique québécois. Les petites centrales modulaires au thorium, d'une capacité de 10 à 100 mégawatts, pourraient alimenter les régions éloignées actuellement dépendantes du diesel, ou fournir de la chaleur industrielle pour les procédés manufacturiers énergivores. Cette flexibilité d'application correspond exactement aux besoins de diversification énergétique du Québec.


Une révolution énergétique en marche

Le succès chinois du premier rechargement en ligne d'un réacteur au thorium marque indéniablement un tournant historique dans l'énergie nucléaire. Alors que les projets hydroélectriques accumulent retards et surcoûts, compromettant leur viabilité économique, le thorium émerge comme une alternative crédible pour répondre aux défis énergétiques du 21ème siècle. L'horizon 2035-2040 pour le déploiement commercial de cette technologie coïncide parfaitement avec les besoins croissants du Québec en électricité propre.

Cette révolution technologique ne remplacera pas l'hydroélectricité existante, mais elle offre une voie complémentaire prometteuse pour la diversification énergétique. Le thorium représente plus qu'une simple innovation technique : c'est une opportunité de repenser notre approche de la production électrique, en privilégiant la flexibilité, la sécurité et la durabilité environnementale.

Pour suivre les dernières innovations en énergies propres et découvrir comment ces technologies révolutionnaires transforment le paysage énergétique québécois, restez connectés avec Squatex, votre partenaire de confiance dans la transition vers un avenir énergétique durable.


Références

[1] South China Morning Post. (2025). China Has World's First Operational Thorium Nuclear Reactor. SCMP. https://www.scmp.com/news/china/science/article/3306933/no-quick-wins-china-has-worlds-first-operational-thorium-nuclear-reactor

[2] NEI Magazine. (2025). China Refuels Thorium Reactor Without Shutdown. NEI Magazine. https://www.neimagazine.com/news/china-refuels-thorium-reactor-without-shutdown/

[3] Ashley, S.F., Fenner, R.A., Nuttall, W.J., & Parks, G.T. (2015). Life-cycle impacts from novel thorium–uranium-fuelled nuclear energy systems. Energy Conversion and Management, 101, 136–150.
https://doi.org/10.1016/j.enconman.2015.04.041

[4] Flyvbjerg, B., & Budzier, A. (2018). Report for the Commission of Inquiry Respecting the Muskrat Falls Project. University of Oxford. https://www.researchgate.net/publication/330382358_Report_for_the_Commission_of_Inquiry_Respecting_the_Muskrat_Falls_Project

[5] Hydro-Québec (2023). Plan d’action 2035 – Vers un Québec décarboné et prospère.
Bibliothèque et Archives nationales du Québec. https://www.hydroquebec.com/a-propos/plan-action.html

[6] Radio-Canada (2024). Québec et Terre-Neuve-et-Labrador s’entendent sur un nouveau contrat pour Churchill Falls.
https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2126419/entente-quebec-terre-neuve-labrador-churchill-falls

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