Quels sont les avantages distinctifs de l'hydrogène blanc ?
Comment l'hydrogène blanc se compare-t-il aux hydrogènes vert, bleu et gris ? Analyse des avantages uniques : émissions réduites, faible consommation d'eau et minimale empreinte au sol.
La demande mondiale en hydrogène devrait doubler d'ici 2030, passant d'environ 94 à 180 millions de tonnes. [1] Aujourd'hui, l'immense majorité de cette production provient encore du reformage de combustibles fossiles, tandis qu'une petite fraction seulement est issue de l'électrolyse alimentée par des sources bas carbone.[1] Ces procédés nécessitent des infrastructures industrielles lourdes et, dans le cas de l'électrolyse, des volumes significatifs d'eau de haute pureté ainsi qu'une électricité abondante.
Dans ce contexte, l'hydrogène blanc – ou hydrogène naturel – émerge comme une alternative prometteuse. Cet article examine trois avantages majeurs de cette ressource géologique : sa faible perturbation de surface, ses besoins limités en eau, et son statut de source d'énergie primaire directement exploitable.
L'hydrogène blanc : une énergie primaire extraite de la Terre
Contrairement aux autres formes d'hydrogène qui nécessitent une transformation énergétique coûteuse, l'hydrogène blanc est directement extrait de réservoirs naturels situés dans la croûte terrestre. Cette distinction change l'équation environnementale : la « réaction chimique » qui produit l'hydrogène ne se fait plus dans un électrolyseur ou un reformeur, mais dans le sous-sol lui-même.
L'hydrogène blanc se forme principalement par serpentinisation, un processus géochimique qui se produit lorsque l'eau réagit avec des roches ultramafiques riches en fer et magnésium, générant de l'hydrogène moléculaire au fil du temps [1] Ce processus naturel, alimenté par l'énergie géothermique de la Terre, peut créer des accumulations d'hydrogène piégées sous des couches imperméables – à la manière des réservoirs d'hydrocarbures. [1]
Le gisement de Bourakébougou au Mali, exploité depuis 2011, en est un exemple emblématique : il alimente en continu le village en énergie grâce à l'hydrogène naturel produit localement. [1]
Avantage #1 : Une perturbation minimale à la surface
L'un des défis souvent sous-estimés des énergies renouvelables réside dans leur empreinte spatiale considérable. Les parcs solaires et éoliens, bien que produisant une énergie décarbonée, nécessitent des surfaces importantes qui peuvent entrer en conflit avec d'autres usages des terres – agriculture, conservation de la biodiversité, habitations.
L'extraction d'hydrogène blanc se distingue par une infrastructure de surface comparable à celle de l'extraction gazière conventionnelle, mais dédiée à un seul gaz énergétique : l'hydrogène. L'essentiel du « système » se trouve alors en profondeur, dans les formations géologiques, plutôt qu'en surface sous forme de vastes installations de production d'électricité.
Infrastructure minimale, impact concentré
Contrairement aux installations de production d'hydrogène par électrolyse alimentée par de grandes fermes solaires ou éoliennes, l'hydrogène blanc exploite la verticalité : l'essentiel du système se situe dans le sous-sol, ce qui réduit l'occupation au sol pour une quantité donnée d'hydrogène produite.
Les technologies développées par Caron Technologies International (CTI) s'inscrivent pleinement dans cette nouvelle manière d'aborder le forage. Leur foreuse Slim Hole carboneutre, brevetée dans six pays, permet la réalisation de puits de seulement trois pouces de diamètre et nécessite une plateforme de 9 700 pi² (900 m²) — soit 7,5 % de la superficie d'un site conventionnel. Grâce à sa conception modulaire en aluminium, son bloc moteur déporté et son fonctionnement électrifié, elle limite fortement les zones perturbées, réduit les déblais et minimise les dommages environnementaux liés aux opérations. Cette approche permet d'envisager l'extraction d'hydrogène naturel avec une empreinte au sol exceptionnellement faible, parfaitement alignée avec les exigences modernes de conservation des écosystèmes.
• Pour en savoir plus sur les foreuses carboneutres de CTI
Avantages concrets
Cette faible empreinte présente des bénéfices immédiats :
• Réduction des conflits d'usage des terres : moins de compétition avec l'agriculture et les autres secteurs
• Acceptabilité sociale : impact visuel limité, infrastructures plus discrètes que de grands parcs éoliens ou solaires
• Coûts fonciers potentiellement réduits : moins d'acquisitions ou de servitudes de terrains
• Déploiement plus rapide : pas de construction d'infrastructures de production électrique de très grande taille en amont des électrolyseurs
Avantage #2 : Des besoins en eau limités
L'eau représente aujourd'hui un enjeu critique pour la production d'hydrogène, particulièrement dans les régions arides où de nombreux projets miniers et énergétiques sont implantés. Dans le cas de l'hydrogène produit par électrolyse, l'eau est à la fois matière première et fluide de refroidissement, ce qui peut poser problème lorsque la ressource hydrique est contrainte.
L'hydrogène géologique modifie cette équation : l'hydrogène est déjà formé dans le sous-sol, et le procédé industriel consiste principalement à l'extraire et le purifier, plutôt qu'à le fabriquer à partir d'eau ou d'hydrocarbures.
Rôle de l'eau dans les différentes filières
Électrolyse : l'eau est directement décomposée en hydrogène et oxygène, ce qui nécessite de l'eau ultra-pure, des systèmes de traitement, ainsi que des circuits de refroidissement.
Reformage du gaz naturel (SMR) : l'eau intervient pour la production de vapeur et le conditionnement des gaz de procédé.
Hydrogène blanc : l'hydrogène étant déjà présent dans le gaz du réservoir, l'eau sert surtout à des opérations d'appoint (déshydratation, nettoyage, refroidissement auxiliaire), et non comme réactif principal.
Dans l'analyse de cycle de vie menée par Brandt sur un cas de référence d'hydrogène géologique, la gestion de l'eau apparaît comme un contributeur mineur à l'intensité carbone globale du procédé, signe que les volumes d'eau mis en jeu restent relativement modestes par rapport à d'autres postes d'émissions. [2]
Un atout dans les contextes contraints
Cette sobriété hydrique potentielle n'est pas qu'un avantage théorique : elle devient particulièrement intéressante dans les zones où l'eau est une ressource stratégique et où les projets énergétiques sont scrutés à l'aune de leur consommation d'eau.
• Australie : depuis 2021, plus de 40 licences d'exploration d'hydrogène naturel ont été émises, et la société Gold Hydrogen a annoncé un gisement estimé entre 1,3 et 8,8 millions de tonnes d'hydrogène dans le sud du pays, illustrant l'intérêt croissant pour cette ressource dans de nouveaux bassins géologiques. [1]
• Afrique de l'Ouest (Mali) : le projet de Bourakébougou démontre la viabilité technique d'une exploitation d'hydrogène naturel à petite échelle dans un contexte rural, avec une alimentation continue du village depuis plus d'une décennie. [1]
Dans un contexte minier, où la gestion de l'eau est souvent un point de friction avec les communautés locales, la possibilité d'une filière hydrogène peu consommatrice d'eau constitue donc un avantage stratégique potentiel.
Avantage #3 : Une empreinte carbone exceptionnellement faible
Au-delà de l'espace et de l'eau, l'empreinte carbone constitue un critère décisif pour évaluer la durabilité d'une source d'hydrogène. L'analyse de cycle de vie (ACV) complète de l'hydrogène géologique montre une performance environnementale remarquable : une intensité carbone moyenne d'environ 0,37 kg CO₂eq par kilogramme d'hydrogène produit, soit environ 3 g CO₂eq par MJ sur la base du pouvoir calorifique inférieur. [2]
Comparaison des empreintes carbone
| Hydrogen source | Emissions (kg CO₂eq/kg H₂) |
|---|---|
| Geological hydrogen (base case) | ~0.37 |
| SMR without capture (natural gas) | ~16.4 |
| SMR with capture (CCS) | ~8.9 |
| Photovoltaic electrolysis | ~3.6 |
Même en tenant compte des incertitudes et des différences de méthodologie entre études, l’écart d’ordre de grandeur entre l’hydrogène géologique (~0,37 kg CO2eq/kg H2) et d’autres filières reste très marqué.
D'où proviennent ces faibles émissions ?
Dans le cas étudié par Brandt, les principales contributions à l'empreinte carbone de l'hydrogène géologique proviennent :
• des émissions fugitives (fuites d'hydrogène et éventuelles traces de méthane dans le gaz),
• des émissions "incorporées" dans l'acier, le ciment et les équipements nécessaires au forage et aux installations de surface,
• de l'énergie de traitement (compression, déshydratation, séparation des gaz).
Ses recherches montre que ces contributions restent faibles au total, conduisant à une intensité carbone bien en dessous de celle de l'hydrogène produit à partir de combustibles fossiles ou même de l'électrolyse photovoltaïque lorsque l'on comptabilise les émissions incorporées des panneaux et des électrolyseurs. [2]
Un résultat contre-intuitif : concurrencer l'hydrogène « vert »
Un résultat particulièrement intéressant émerge lorsqu'on compare l'hydrogène blanc à l'hydrogène produit par électrolyse alimentée par des panneaux photovoltaïques. Les travaux cités par Brandt indiquent une intensité carbone moyenne d'environ 3,6 kg CO₂eq/kg H₂ pour l'hydrogène photovoltaïque, soit un ordre de grandeur environ dix fois plus élevé que dans le cas de l'hydrogène géologique étudié. [2]
La différence vient notamment du fait que :
• les panneaux solaires nécessitent la purification du silicium, la fabrication et le transport des modules,
• les électrolyseurs mobilisent des matériaux et des procédés de fabrication spécifiques,
• l'ensemble de l'infrastructure électrique (transformateurs, câblage, stockage éventuel) a lui aussi une empreinte carbone incorporée.
À l'inverse, dans le cas de l'hydrogène blanc, le « réacteur » principal est la formation géologique elle-même, déjà en place et active via la serpentinisation, ce qui évite une partie des émissions associées à la fabrication d'équipements de production d'hydrogène. [1][2]
Réduction globale par rapport au gaz naturel
Pour une vision plus complète, il faut inclure la phase d'utilisation finale. Brandt estime que, en intégrant production, transport et usage final, l'hydrogène géologique pourrait offrir une réduction globale d'environ 90 à 95 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport au gaz naturel conventionnel utilisé pour la même quantité d'énergie utile. [2]
Une telle décarbonation ouvre la voie à des applications dans des secteurs difficiles à électrifier : réduction du minerai de fer, chaleur haute température pour la cimenterie, transport maritime longue distance ou encore applications minières énergivores.
Conclusion
Dans un contexte de transition énergétique urgente, l'hydrogène blanc mérite une attention particulière. Ses trois avantages structurels — empreinte spatiale potentiellement minimale, besoins en eau limités, et empreinte carbone très faible dans les scénarios étudiés — en font une ressource particulièrement intéressante pour le XXIe siècle. [1][2]
Pour l'industrie minière, l'hydrogène blanc présente des opportunités concrètes, notamment dans les contextes où l'approvisionnement en eau est contraint ou les infrastructures énergétiques sont limitées, et où les compétences en exploration géologique et en extraction de fluides sont déjà bien développées.
Certes, plusieurs incertitudes demeurent : l'étendue réelle des réserves mondiales, la variabilité de composition des gisements, la dynamique de recharge des réservoirs et le développement de cadres réglementaires adaptés. [1] Ces questions nécessitent des investissements en recherche et en exploration pour affiner les méthodes de détection et d'évaluation des ressources.
Néanmoins, dans le contexte de la transition énergétique, l'hydrogène blanc constitue une option complémentaire aux autres sources d'hydrogène bas carbone. Son développement contribuera à diversifier le mix énergétique et à répondre aux besoins croissants en hydrogène décarboné des secteurs industriels et du transport.
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Références
[1] Blay-Roger, R. et al. (2024). Natural hydrogen in the energy transition. Renewable and Sustainable Energy Reviews, 189, 113888.
[2] Brandt, A. R. (2023). Greenhouse gas intensity of geologic hydrogen. Stanford University / EarthArXiv.

